Prolapsus Génital (Quand le latin est plus chic qu’une descente d’organe…)

01 octobre 2017

Tel que promis, je vous ai concocté un beau petit blog plus neutre sur le charmant thème des descentes d’organes pour faire suite au précédent blogue Comment mon vagin déformé a brisé mon cœur (ma vessie ne fuit pas, elle s’enfuie…). C’est fini la déprime ! C’est maintenant le temps d’apprendre et d’agir en conséquence.

First things first, si vous souhaitez un laïus totalement didactique, ou bien si vous souhaitez en apprendre davantage sur ce qu’est le prolapsus pelvien, aussi appelé prolapsus génital ou bien descente d’organe, je vous invite à consulter ce dossier sur mon site internet. Si le sujet vous intéresse, je prends pour acquis que vos yeux sont allés se balader sur ladite page. (Je ne vais quand même pas me taper l’exercice de vous redire dans d’autres mots ce que j’ai déjà si bien expliqué une première fois, tsé…)

Faque, vous revenez de votre petite balade sur ladite page et vous venez d’apprendre qu’il y a quatre principaux types de prolapsus génital: le cystocèle (la vessie vous descend dans le vagin), l’hystérocèle ou prolapsus utérin (l’utérus vous descend dans le vagin), le rectocèle (le rectum vous descend dans le vagin) et un dernier assez rare, l’entérocèle (le petit intestin vous glisse entre le vagin et le rectum). Chouette tout ça. Si on gagne le gros lot, on expérimente tout ça en même temps (voir image ci-jointe).

Vous avez aussi appris que les principaux symptômes sont une sensation de lourdeur, de masse ou de corps étranger dans, à l’entrée ou à l’extérieur du vagin. Que ça affecte la fonction urinaire, sexuelle et fécale. Bin quin, ça nous étonne compte-tenu que c’est la vessie, l’utérus, le rectum ou le petit intestin dont il est question ! Je vous félicite, vous êtes désormais plus cultivées sur le sujet.

Mais là, ce que vous voulez savoir, c’est comment ça bien pu vous arriver (le fameux: « Pourquoi moi ? ») et comment vous allez survivre à ça. Ça peux-tu se réparer ? Pire, ça peux-tu s’aggraver ? I know. Je le sais parce que des femmes dans votre situation, j’en ai traité une, pis une autre (pis une autre, pis encore une autre, pis encore ben des unes autres…). C’est que, voyez-vous, à ce jour, on estime qu’un peu plus de 40% (certaines études vont jusqu’à 50%, voir même 60% !) des femmes souffriront, au cours de leur vie, d’un prolapsus pelvien. Hello ! Presqu’une femme sur deux… Alors, oui, je vais répondre à vos questions. Pour que l’info se diffuse. Pour qu’on diminue cette statistique et qu’on améliore la qualité de vie des femmes.

Alors, mesdames, pourquoi vous ? Parlons ici biomécanique de la région pelvienne. Les organes pelviens sont maintenus dans la cavité pelvienne (aka le bassin) par deux principaux systèmes: le système musculaire (les muscles du plancher pelvien) et le système ligamentaire (les tissus conjonctifs et ligaments stabilisant les organes). Pis là, pour illustrer le tout, je vais comparer vos organes à un bateau dans une écluse… Ben oui, je suis folle de même ! Mettons que votre vessie est un bateau. Ben, le bateau tient dans l’écluse grâce à deux système : l’eau qui est juste au bon niveau en dessous de lui (aka le plancher pelvien) et par le cordage qui l’amarre au haut de l’écluse (aka les ligaments). Qu’arrive-t-il si le niveau de l’eau est trop bas pour le bateau ? Ça tire méchamment fort sur les cordes ! Et qu’arrive-t-il si les cordes sont faibles ? Le bateau (aka la vessie) tombe. Pis là, si vous vous demandez en quoi ça ressemble à votre situation, je vous réponds qu’une partie de la réponse se retrouve dans mon article Sport après l’accouchement ; danger ! paru plus tôt cette année. Parce que sachez que la grossesse et l’accouchement vous ont ramolli la « canne de conserve ». Votre plancher pelvien a probablement décidé de se rapprocher du plancher, justement. Et que ça, ça laisse vos organes flacotter au bout de leurs ligaments, comme le bateau au bout de ses cordes.

C’est là, qu’en plus de biomécanique, je vous parle de physiologie de la femme en période post-natale. Parce que vous en temps normal (genre pré-bébé) et vous en période post-partum, êtes loin d’être la même femme. Ce que je veux dire par là, c’est que, suite à l’accouchement, votre corps continue à sécréter une hormone appelé relaxine. La relaxine est une hormone qui permet aux ligaments, muscles et tissus conjonctifs de s’étirer lors de la grossesse. Voilà donc que vous sécrétez cette hormone pour un minimum de trois mois suite à votre accouchement. Et si vous allaitez, comptez plutôt un bon six mois. On commence même à parler qu’elle peut persister jusqu’à 3 mois APRÈS la fin de l’allaitement… Conséquence ? Votre plancher ressemble plutôt à un trampoline trop souple et vos ligaments ressemblent plus à des élastiques de bungee qu’à de la corde… Mouin, pas top pour tenir les organes en place. Pis tant qu’à baigner dans les hormones, intéressons-nous à l’œstrogène aussi. Cette belle hormone féminine qui régule le cycle menstruel et prend soin de la santé de nos organes génitaux. Bin elle, je peux vous dire qu’on se baigne pas dedans en période post-partum. Son niveau est plutôt au sous-sol. C’est comme un avant-goût de la ménopause. Ainsi donc, amincissement, pâleur, fragilité, sensation de sécheresse des tissus vaginaux et vulvaires sont au rendez-vous avec plus ou moins d’intensité selon chaque femme.

Le message que j’essaie de faire passer, c’est que la période post-natale est un moment crucial pour mettre en place la prévention ou la correction de prolapsus. Parce que le corps de la nouvelle maman offre un terrain favorable à leur développement. Pourquoi vous ? Parce que vous répondez à pas mal tous ces critères.

On enchaîne. Vous êtes rares à me poser la question suivante, alors je la pose à votre place car je juge l’info plus que pertinente pour vous. Quels sont les facteurs de risque d’une descente d’organe ? Qu’est-ce qui a des chances de faire tomber votre bateau ou ben de défoncer votre « canne de conserve » ? Réponse : tout ce qui créer de la pression dans l’abdomen. Aussi simple que ça. La pression number one ? L’accouchement, sans l’ombre d’un doute. Mais la grossesse aussi, you know. Donc, même dans le cas de césarienne, il y a un risque. Autre forme de pression ? La constipation. Les efforts de poussées, ça vous endommage un périnée. L’obésité aussi, tsé, c’est lourd sur le dos du plancher pelvien. Pis les efforts physiques intenses, les soulèvements de charges (Coquille, bébé, poussette, sac à couche… les kilos s’accumulent rapidement, non ?), les emplois durs physiquement. Les sports de sauts ou d’impact (voyez vos organes rebondir sur le trampoline seulement retenus par leurs élastiques de bungee…) comme la course, l’aérobie. Les sports avec pression sur le périnée comme les redressements assis, l’haltérophilie. Les problèmes respiratoires entraînant de la toux ou des éternuements chroniques (pression abdominale !) comme l’asthme, les allergies, le tabagisme.

Faque oui, ça peut s’aggraver. Comment ? En continuant de faire subir de la pression à votre bateau alors que vous n’avez pas remonté le niveau d’eau sous lui. En continuant de faire subir de la pression à votre « canne de conserve » alors que vous n’avez pas entrepris de démarche pour resolidifier et redresser ses parois. Maintenant, imaginez que vous accumulez tous les facteurs de risque énumérés ci-haut dans de tels conditions et ce, dans la période critique post-natal. Vous vous rappelez Gumby ?

Pas de panique, ça peut se réparer. Jusqu’à un certain point. Comment ? En réparant votre écluse, en y faisant remonter le niveau de l’eau. Retapez votre « canne de conserve ». En d’autres mots, faites votre rééducation périnéale et pelvienne ; retrouvez la fonction optimale de votre plancher pelvien, de vos abdominaux et de votre diaphragme. Corrigez les déformations de votre « canne de conserve » en adoptant une posture adéquate. Gardez en tête que la guérison est non linéaire. Les muscles du périnée supportent les organes pelviens sur leur dos. Mais quand il y a de la houle dans l’écluse, le bateau va se faire brasser par les vagues, faute d’amarres solides. Même chose pour vos organes. Ce pourrait que vos muscles du plancher pelvien vivent quelques tempêtes et que vous ressentiez à nouveau la lourdeur lors de périodes où vous êtes très fatiguée ou avez fait subir plus de pression à votre périnée. Rien de tel qu’une belle grosse bronchite ou un déménagement pour nous rappeler que la gravité existe…

Mais surtout, chères mamans, ça peut se prévenir. Comment ? Suite à tout ce qui vient de se dire, vous devriez, en usant d’un peu de votre cocologie, arriver à répondre à cette question. Mais bon, la fatigue nous gobant facilement le cerveau, je vais vous aider. Corrigez votre posture. Rééduquez vos muscles stabilisateurs (aka la « boite de conserve »). Minimisez les facteurs de risques, surtout dans la période critique post-natal. Voilà.

Le tout, vous l’aurez compris, ce fait beaucoup plus facilement et efficacement avec l’aide et le support d’une physiothérapeute en rééducation périnéale et pelvienne. Restez à l’affût, la remontée des eaux de votre écluse bientôt disponible chez une physiothérapeute près de chez vous !

P.S.: Il arrive que dans certains cas, la rééducation périnéale et pelvienne ne corrige pas de façon pleinement satisfaisante les symptômes pour certaines femmes. Il existe alors une alternative bien intéressante à envisager avec votre physiothérapeute ou médecin avant de vous tourner vers l’avenue plus drastique de la correction chirurgicale. Il s’agit du pessaire, une prothèse vaginale qui vous tiens le tout bien en place. Un peu comme un soutien-gorge maintenant la poitrine, le pessaire retient la vessie et/ou l’utérus à l’intérieur du vagin.