La posture ; la clé contre tous les maux ?

01 janvier 2018

La posture n’est pas glamour. Elle ne se vend pas bien auprès des clients qui consultent un professionnel de la santé pour une problématique quelconque du domaine périnéal, pelvien ou plus globalement musculosquelettique. Beaucoup de clients ne trouvent pas justifiable de payer $$$ les services d’un physio pour se faire dire que la posture qu’ils adoptent depuis tant d’années n’est pas optimale. Dans leurs oreilles, ça sonne comme : ben, elle est pourrie. Assez insultant pour certains. Pis, on va se le dire, modifier sa posture, c’est beaucoup d’effort. On voit un côté irréaliste à ça. Plusieurs doutent fortement que ça aura même un effet réel sur le problème.

D’un autre côté, j’ai passé des milliers dizaines d’heures à étudier, analyser, décortiquer la posture lors de mes études universitaires avant d’obtenir mon diplôme de physiothérapeute. Plusieurs dizaines d’heures à faire concorder une évaluation posturale avec le reste de l’évaluation physique. De devenir mécanicienne du corps humain (biomécanicienne, en fait) et de concevoir que l’alignement initial des structures aura un impact sur la stratégie du corps à exécuter un mouvement. De faire les liens « cause à effet » : quels défauts de posture engendrent généralement quelles dysfonctions ou blessures. On peut facilement comprendre comment des pneus non-alignés sur une voiture entraînera une usure inégale des pneus… Pourquoi est-ce si dur d’appliquer et surtout de croire au même concept lorsqu’il s’agit de notre corps ?

Je vais vous révéler un secret. Devant autant de scepticisme et de mauvaise foi, les jeunes professionnels de la santé finissent souvent par rayer l’aspect « rééducation posturale » de leur plan de traitement. Parce que les bébés physios (fraîchement sortis de l’Université avec une foule de notions et de concepts mais zéro ou presque expérience what so ever) sont généralement insécures (syndrome de l’imposteur). Ils veulent camoufler cette impression de manque de compétence (en fait c’est plutôt un manque d’expérience) en cherchant à se faire aimer. Pour y arriver, ils ont cette tendance de vouloir donner au client ce qu’il veut, ce qu’il croit être venu chercher. Des manœuvres, des techniques, du « hands-on », bref du travail avec les mains là où ça fait mal pour régler le problème, guérir la structure affectée. Faque les jeunes physios finissent par ne pas aimer la posture, ça « dresse » les clients contre eux. I get it. De nos jours, on a cette mentalité de chercher un « quick fix » à nos problèmes sans avoir à fournir trop d’effort pour modifier notre train de vie. Mais après une décennie à pratiquer, je ne me considère plus comme une bébé physio. Et je ne veux pas me contenter de donner à mes clients ce qu’ils croient avoir besoin, mais bien ce qu’ils ont réellement besoin pour corriger le problème à la source. Je ne veux pas juste éteindre des feux, je veux prévenir qu’ils ne s’allument, en premier lieu.

Malgré tout, malgré cette relation amour-haine, plus les années passent et plus j’apprécie la posture. L’amour prend le dessus. Pas seulement pour l’esthétisme qu’elle procure, même si mon œil aime bien. Non, j’y vois plus clairement la clé pour finalement apporter une solution long terme à l’ensemble des maux qui amènent les gens à me consulter. La posture en dit long sur la personne qui l’adopte.

Qu’est-ce qu’il y a de SI miraculeux à la posture ? Eh bien, dans la sphère rééducation périnéale et pelvienne, tout tourne toujours autour de l’enceinte abdominale. Et oui, ma fameuse « canne de conserve » ! Si vous ne savez pas de quoi je parle et que vous n’avez toujours pas lu mon autre article Sport après l’accouchement ; Danger ! ben là, c’est un fichu bon moment. Même si vous n’avez jamais accouchée. Même si vous êtes un homme. Les muscles sont les mêmes (ou presque, je le jure !), les principes de pression intra-abdominale aussi. Instruisez-vous sur la « canne de conserve » pis revenez-moi après. Alors, je disais donc que tout revient toujours à l’enceinte abdominale et au maintien d’une pression intra-abdominale stable. En effet, les raisons menant à consulter en rééducation périnéale et pelvienne, plus souvent qu’autrement, sont des symptômes d’un déséquilibre de pression intra-abdominale. Par exemple ? Au niveau du devant de la « canne de conserve » (l’abdomen) une pression mal gérée pourra mener à une diastase des grands droits (voir mon article Au secours ! J’ai déchiré du ventre !), une hernie ombilicale ou inguinale, des douleurs ou une diastase de la symphyse pubienne. À l’arrière de la « canne de conserve » (la région lombaire et pelvienne), on verra des douleurs lombaires (entorse lombaire), des blessures aux disques intervertébraux (hernies discales), des douleurs au nerf sciatique (sciatalgie), des douleurs aux articulations sacro-iliaques (sacro-ilites). Et le fond de la « canne de conserve » (le plancher pelvien) ? Fuites urinaires et fécales, descentes d’organes, hémorroïdes, varices vulvaires, lourdeurs ainsi que douleurs périnéales.

Ouin, mais j’ai juste à renforcer les muscles responsables de tenir tout ça et je vais le régler le problème, me direz-vous. Sauf que pour moi, ça ne fait aucun sens de faire des exercices pour renforcer un ou des muscles dans le seul but de mieux pouvoir pousser dedans à journée longue avec une mauvaise posture… Et qu’arrivera-t-il le jour où vous arrêterez vos exercices ? Parce qu’on le sait tous, il y a de très fortes chances que ça arrive… D’autant plus que vous pourriez avoir de muscles stabilisateurs bien fort mais tout de même souffrir d’une dysfonction. Pourquoi ? Parce qu’il ne suffit pas d’avoir une musculature stabilisatrice bien développer, il faut aussi réussir à s’en servir adéquatement. Il arrive que le corps ait perdu la coordination dans l’activation de ses muscles stabilisateurs. Pour mieux illustrer ce problème, imaginons l’abdomen comme une paille qui trempe dans un verre d’eau. Si vous avez suffisamment de coordination pour maintenir votre doigt sur le dessus de la paille, vous réussirez à ressortir celle-ci ainsi que l’eau qu’elle contient. Perdez la coordination, et l’eau qui s’y trouve fuira au sol. Sachez que le maintien d’une mauvaise posture entraîne presque immanquablement une inhibition (difficulté d’activation) d’un ou de plusieurs stabilisateurs. Il en résulte alors une incoordination musculaire et, au long terme, BAM ! une dysfonction qui récidive...

La magie derrière la bonne posture, c’est que ça facilite la normalisation de la pression abdominale… ainsi que l’activation adéquate (que l’on nomme la coordination) des muscles stabilisateurs. Pourquoi volontairement se passer de cet atout majeur ?

Humm, mais qu’est-ce que c’est une bonne posture ? Pour une physio en rééducation périnéale et pelvienne comme moi, c’est tout ce qui restaure la forme d’origine de la « canne de conserve ». Ou, si vous préférez, une belle job de débosselage de carrosserie. Premièrement, un couvercle (diaphragme) positionné bien au-dessus et parallèlement au fond de la canne (plancher pelvien). Ensuite, une paroi qui n’est pas cabossée soit par compression d’un côté ou par bombement de l’autre. Ce que ça veut dire ? Apprenez à bien placez votre thorax au-dessus de votre bassin ! Un bassin en avant de vos chevilles ? Des fesses rentrées sous le bassin ? Un dos enroulé ? Ho que non. Des fesses sorties ? Un dos cambré ? Non plus ! Un thorax affaissé ? ou encore redressé style « posture militaire » ? Exit ! On cherche l’équilibre en plein milieu. (Si vous cherchiez encore laquelle des trois dames a la meilleure posture, celle de droite !) J’aime bien visualiser le thorax comme une cloche. À la base de la cloche (thorax), on retrouve le muscle diaphragme. Vous vous tenez enroulé (dame de gauche) ? La cloche sonne par en arrière et votre diaphragme s’oriente plutôt vers vos fesses. Vous vous tenez posture militaire (dame du centre) ? La cloche sonne par en avant et votre diaphragme s’oriente vers votre pubis/bas-ventre. Et si, comme la dame de droite, on faisait en sorte d’orienter le diaphragme au-dessus du plancher pelvien ?

La posture : l’exercice du saut en ski

Voici un exercice utile pour favoriser l’acquisition d’une bonne posture. En effet, il permet d’éliminer facilement les défauts de posture les plus fréquemment rencontrés. Cette exercice favorise le placement adéquat de la cage thoracique au-dessus du bassin. - Prenez la position debout, pieds largeur des hanches. La nuque est bien allongée permettant une légère rentrée du menton. Les bras sont positionnés le long du corps, les épaules de part et d’autre du thorax (et non en avant du tronc). - Lors de l’expiration, contractez le plancher pelvien et le transverse de l’abdomen et transférez le poids du corps vers l’avant-pied en maintenant le tronc le plus droit possible, tel un sauteur en ski (voir l’image). Vos talons doivent rester en contact avec le sol. - Maintenez la position du sauteur en ski 10 à 20 secondes. - Revenez doucement à la position d’origine en maintenant telle quelle la relation thorax/bassin. Notez la position « silencieuse » de la cloche. - Pratiquez l’exercice pour un total de 5 à 10 positions du sauteur en ski.

Pour monsieur-madame-tout-le-monde, je conçois que ça peut être ardu de déchiffré sa posture. Ça m’a pris des centaines d’heures pour développer cette aptitude. Il n’y a aucune gêne à demander de l’aide avec cette tâche. Comme il n’y a aucune gêne à demander à votre mécanicien un alignement de vos pneus…

Restez à l’affût, la bonne posture au quotidien ainsi que dans vos activités favorites comme possiblement le seul programme de « maintien » dont vous aurez besoin bientôt disponible chez une physiothérapeute près de chez vous !